Par Jean-Edgar RODONDI, BfB SOFIROM Société Fiduciaire
On ne peut plus s'intéresser aux expériences d'épargne et de crédit décentralisés sans se préoccuper du devenir institutionnel des projets, réseaux, caisses, mouvements, associations, banques qui se sont implantés depuis quelques années un peu partout dans les pays en développement.
Le phénomène a naturellement pris de l'ampleur et un certain caractère d'urgence dans les pays concernés par les nouvelles dispositions législatives de l'UEMOA. En Afrique de l'Ouest en effet, les autorités monétaires ont décidé de combler le vide législatif qui existait entre, d'un côté une loi bancaire s'adressant aux banques commerciales, aux institutions financières , aux banques de développement et aux institutions bancaires étatiques (caisses d'épargne nationales), et de l'autre des législations sur les associations et sur les coopératives dont les références aux activités d'épargne et de crédit restaient largement insuffisantes pour permettre une surveillance et une protection des créanciers-épargnants . Ce besoin de légiférer s'est fait aussi sentir dans d'autres pays; on fait référence ici à la Guinée et au Rwanda, par exemple , ce dernier ayant actuellement d'autres impératifs, comme on l'imagine.
On peut choisir diverses approches pour favoriser l'institutionnalisation. Bien entendu, la première qui vient à l'esprit est celle de mettre en place une législation. Celle-ci peut prendre la forme d'une loi cadre, avec pour ambition d'inciter toutes les institutions concernées à respecter un minimum de règles (en matière de responsabilité des organes, de règles prudentielles, de déontologie par exemple). On peut aussi choisir un modèle et en faire celui dans lequel chacun devra tôt ou tard se fondre. Cette deuxième approche part peut être de la constatation que ce qui est bon ailleurs est aussi bon pour les systèmes des pays en développement. Une troisième approche plus pragmatique, plus difficile sans doute, est de donner à chaque institution concernée une structure juridique qui traduise le mieux ses spécificités, en veillant à ce que les techniques universelles demeurent respectés. Cette troisième option heurte ceux qui ne voient que dans l'uniformisation, le critère principal du succès à long terme des objectifs poursuivis. Dans cette hypothèse, la législation bancaire est en général suffisante dans la mesure ou un article spécifique permet cette démarche.
Il ne nous appartient pas ici de porter un jugement sur ces options. On pourrait tout au plus souhaiter que les personnes qui sont en charge de ces questions et peuvent influencer les options prises optent pour la souplesse, laissant à chaque démarche sa chance de démontrer qu'elle est possible.
Mais, nous allons plus loin dans la réflexion sur l'institutionnalisation en posant la question : n'y a-t-il pas encore une autre voie ? On doit constater qu'à notre connaissance , toutes les approches d'institutionnalisation se font autour de concepts qui sont ceux des législations occidentales: association, coopérative, société anonyme, union.
Ce qui nous frappe davantage, c'est combien on a de la peine à imaginer au delà des mots, des systèmes de fonctionnement qui sortent de nos schémas. Et s'il fallait refaire, par exemple une loi sur les coopératives dans laquelle le sacro-saint principe un homme une voix ne serait pas respecté, mais qui introduirait un autre mode de fonctionnement, plus proche de la sensibilité, de la culture, de la manière dont vit la communauté concernée!
Ces quelques réflexions montrent que le sujet est loin d'être épuisé. C'est à l'épreuve du temps qu'on pourra juger des succès et des échecs des diverses démarches pour autant bien sûr que chacun admette la possibilité de ne pas uniquement copier un modèle.
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Horizon Local 1997
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