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Dans la lignée du mouvement coopératif ?
La coopérative de travailleurs en France


Ou comment encourager la volonté d'entrepreneurs à mieux répartir au sein de l'entreprise les responsabilités et les bénéfices entre tous les salariés, et à s'inscrire dans un mouvement national capable de propager des idéaux de partage et offrir un soutien aux membres du réseau.

La société coopérative ouvrière de production, forme de société commerciale aménagée pour répartir au sein du personnel de l'entreprise tant les responsabilités que les bénéfices, est née sous l'ère industrielle pour offrir une alternative à la concentration des pouvoirs et des capitaux.

Dans l'ouvrage d'Antoine Antoni "La coopération ouvrière de production", nous relèverons quelques étapes de ses évolutions.

Se développant au XIXe sous l'impulsion croisée d'intellectuels théorisant sur la coopération (tel Fourier proposant de "transformer tous les salariés en propriétaires co-intéressés") et d'ouvriers initiant des expériences de création d'associations de travailleurs, ce mouvement a connu une histoire mouvementée, en particulier en milieu de siècle : si la Commune, par décret, indique que certains marchés seront de préférence confiés aux sociétés d'ouvriers, les coopératives et leurs militants seront bientôt anéantis par la répression versaillaise.

À partir des années 1880, des adjudications de l'Ètat et des Collectivités publiques sont ouvertes aux sociétés ouvrières. "En 1893 est inscrit au budget de l'État un crédit pour l'attribution de subventions aux sociétés ouvrières. En 1915 est votée la loi sur les Sociétés Coopératives Ouvrières de Production et le Crédit au travail. La loi de 1928 sur les HLM réserve aux SCOP une partie des travaux des HLM. Le décret du 1er octobre 1931 institue un régime spécial pour leur participation aux marchés de l'État et des collectivités publiques."

Outre ces avantages progressifs accordés par la puissance publique, le développement du mouvement coopératif est attribué à deux causes principales : la création d'une fédération nommée depuis 1937 "Confédération Générale des Sociétés Coopératives Ouvrières de Production", et un outil financier, la Banque française du Crédit coopératif.

On note dans le mouvement coopératif une progression après 1968. Stimulés par "l'esprit de mai", se créent "de petits groupes coopératifs très motivés de jeunes diplômés ou de jeunes artistes. Ces architectes, ces comédiens, ces éducateurs, ces techniciens de l'audiovisuel ou de l'informatique n'attendent pas de leur engagement coopératif une promotion économique. Ils entrent en coopération pour pouvoir travailler librement dans un cadre choisi, et suivant des règles délibérées en commun".

Aujourd'hui les SCOP subissent les chocs infligés aux entreprises de petite et moyenne dimensions dans une économie de marché de plus en plus maîtrisée et contrôlée par les très grandes entreprises capitalistes. Leur avenir se situerait essentiellement dans la reprise d'entreprises traditionnelles saines, ou dans leur collaboration aux "économies de pays" en partenariat avec les collectivités locales.

Schématiquement, la SCOP permet une déconcentration des pouvoirs au sein de l'entreprise grâce au fameux principe "un homme = une voix", sans prise en considération du nombre de parts sociales détenues, une déconcentration des capitaux grâce au principe du capital variable facilitant un prélèvement sur les rémunérations pour répartir la propriété de l'outil de travail entre les salariés ; elle bénéficie de soutiens de la confédération et des unions régionales financées par les Scop elles-mêmes (révision comptable, conseils juridiques, fiscaux, stratégiques, formations à la gestion et au management participatif, appui à la création), d'un régime spécial pour l'accès aux marchés publics, souvent de réductions de taxes professionnelles.

Le lien entre les mouvements coopératifs et associatifs se découvre bien autour des principes de solidarité. Ainsi, le "Comité de liaison des activités mutualistes, coopératives et associatives" publiera en 1980 une Charte de l'économie sociale affirmant les bases d'une identité et d'une volonté commune fondées sur des idéaux de liberté d'initiative, de justice sociale et de solidarité.

Mais la coopérative à la française, si elle suppose la mise en œuvre de meilleures répartitions des pouvoirs et des gains entre les salariés de l'entreprise, reste placée sur le marché concurrentiel. Elle intervient peu dans les domaines d'activité à l'économie déficitaire comme le spectacle vivant ou les services aux personnes, et n'induit pas dans ses statuts une ouverture à la participation de bénévoles.

Un regard vers l'Italie est alors intéressant car le mouvement des coopératives y a progressé dans ce sens.


OPALE - Culture et Proximité - numéro 4

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