Par Mayada M. Baydas ; Douglas H. Graham ; Liza Valenzuela, adapted by Karen King (ADA)
Les banques commerciales ont été très longtemps absentes du secteur de la micro-finance. Face à ce vide, des institutions financières spécialisées et des ONG ont développé des méthodologies financières pour servir les pauvres qui ont généré des taux de remboursement comparables à ceux des banques commerciales. Ces ONG sont arrivées à des niveaux importants d'autosuffisance, certaines ont même atteint le seuil de rentabilité sans subsidiation.
La plupart des ONG spécialisées en micro-finance rencontrent des problèmes majeurs à différents niveaux comme la structure organisationnelle, les droits de propriété ou la structure de gouvernance, niveaux généralement forts au sein des banques commerciales. C'est notamment la raison pour laquelle certaines ONG se sont transformées en véritables intermédiaires financiers réglementés et habilités à mobiliser l'épargne.
Cependant, la concurrence croissante au sein du secteur bancaire a forcé certaines banques à s'intéresser à de nouveaux marchés comme la micro-finance. Cette exploration a été facilitée notamment par l'octroi de garanties de différents donneurs.
Le secteur bancaire domestique est un phénomène relativement récent dans beaucoup de PVD, particulièrement en Afrique. La réglementation stricte de ce secteur dans ces pays et l'obligation de garanties importantes pour l'obtention d'un prêt n'a pas incité les banques à s'intéresser au financement de la micro-entreprise. Généralement, les banquiers considèrent la micro-finance trop risquée, trop chère avec des barrières socio-économiques et culturelles trop importantes.
Néanmoins, les banques ont des avantages comparés certains dans la micro-finance :
- il s'agit d'institutions réglementées avec des critères de gestion stricts,
- elles ont généralement un réseau important d'agences dans le pays ;
- leur système de contrôle interne et leur comptabilité sont efficients ;
- elles ne dépendent pas des ressources incertaines des donneurs ;
- elles offrent des services financiers attractifs pour une clientèle de micro-entreprises.
Les contraintes restent cependant importantes. Les banques ne s'intéressent pas par essence aux pauvres, elles n'ont ni la structure organisationnelle, ni la méthodologie financière, ni les ressources humaines adaptées aux micro-crédits.
L'objectif de cette étude est de tirer des conclusions intéressantes sur les perspectives de développement de la micro-finance au sein du secteur bancaire traditionnel sur base de l'analyse des caractéristiques de 18 banques commerciales ayant une activité plus ou moins importante en micro-finance.
L'échantillon des banques étudiées peut être divisé en 2 grandes catégories :
des grandes banques importantes sur leur marché national respectif dont les activités de micro-crédit constitue une part relativement faible de leurs activités ;
de petites banques spécialisées dont l'activité de financement de la micro-entreprise est occupe une place prédominante.
Les grandes tendances qui ont émergé de cette étude peuvent être résumées de la façon suivante :
Certaines banques étudiées ont fait preuve d'une croissance importante ces derniers temps dans l'activité de micro-financement.
Les banques utilisent la base financière constituée par leurs déposants pour accorder la plupart des micro-crédits. Les fonds provenant de donateurs et autres sont soumises à certaines conditions qui limitent leur utilisation.
L'engagement profond dans la micro-finance est surtout l'apanage des petites banques spécialisées ou des plus grandes institutions financières qui ont créé un département indépendant spécialisé en micro-finance.
La micro-finance au sein des banques est souvent le résultat des efforts d'une ou d'un petit groupe de personnes qui en font la promotion. Le développement de cette activité au sein de la banque a rarement été la seule recherche de profit.
Les exigences réglementaires ne semblent pas être un obstacle majeur à l'activité de micro-crédit pour la plupart des banques interrogées.
Les micro-crédits offerts par les banques, bien que similaires à ceux offerts par les ONG à certains égards : remboursements fréquents de petites sommes, sont en moyenne de taille plus grande. En outre, les micro-crédits sont différents des crédits classiques au niveau de leur terme et conditions, des taux d'intérêt plus élevés et des exigences de garantie moins strictes.
Les banques, à quelques exceptions, octroient les micro-crédits sur une base individuelle et non de groupe solidaire comme certaines ONG.
Il y a relativement peu de lien entre les banques et les ONG au sein de l'échantillon étudié.
Les banques, dans un certain nombre de cas, bénéficient de l'assistance technique de donateurs pour se lancer dans l'activité de micro-financement et pour l'identification de méthodologies appropriées.
Le recrutement du personnel spécialisé en micro-finance se fait en dehors de la banque. La rémunération est souvent basée sur le système de prime à la performance.
Globalement, le rôle des donateurs et des réseaux d'assistance technique jouent un rôle clé dans le lancement des programmes de micro-crédit et dans le changement des mentalités au sein des banques. Cette intervention doit cependant être limitée dans le temps. Normalement, les banques deviennent autosuffisantes après 3 à 4 années d'expérience en micro-finance.
Dans ce contexte, les donateurs doivent encourager les initiatives des banques en micro-finance. Ils doivent aider ces dernières à surmonter les obstacles auxquels elles sont le plus souvent confrontées :
Les donateurs doivent favoriser la création d'un environnement réglementaire favorable au développement de la micro-finance.
Les donateurs ne doivent pas se contenter de mettre des fonds subsidiés à la disposition des banques, ils doivent également mener des activités de sensibilisation pour changer les mentalités et éliminer les préjugés des banquiers (séminaires, formation,...). Un moyen de juger l'intérêt que portent les banques à la micro-finance est de vendre aux enchères les subsides.
Les donateurs doivent étudier quels sont les meilleurs outils pour promouvoir les services financiers aux pauvres.
Les donateurs doivent contribuer activement au transfert du know-how en micro-finance et à la formation du capital humain. Ils doivent diffuser une information détaillée sur les bonnes pratiques dans le domaine. Le coût de cette assistance technique devrait être partagé entre les bénéficiaires (banques, ONG,...) et la communauté des donateurs.
En conclusion, il est important de distinguer les banques spécialisées en micro-finance des ONG qui se sont transformées en banques pour les pauvres. Les premières doivent trouver un type d'organisation qui minimise les coûts au sein de l'institution bancaire tout en s'adaptant à la clientèle de la micro-finance. Les secondes doivent trouver une structure de gouvernance appropriée au fonctionnement de la banque.
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