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Ce
qu'il faut savoir sur Internet
LEGISLATION
ET INTERNET - RESPONSABILITE ET PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES
No
laws land. Telle a été, pour un temps, la réputation
d'Internet. Fantasme ou réalité ? Certains internautes
veulent y croire. Pas le législateur.
La question
de la responsabilité recouvre sur Internet une importance
particulière. Il en va ainsi de la responsabilité
éditoriale qui, sur un site et son forum, incombe aux
personnes en charge de la publication. Exemple : le Tribunal
de grande instance de Lyon a condamné, le 28 mai 2002,
les deux responsables d'un site de défense des consommateurs
à verser une somme de 80 000 ¤ à titre
de dommages et intérêts à la société
de commerce en ligne Pere-Noel.fr, au motif que des propos injurieux
et diffamatoires à l'encontre du cybermarchant avaient
été tenus sur leur forum de discussion. "
Les juges ont tendance à donner raison aux professionnels
- les commerçants - et tort aux non-professionnels. Or,
selon moi, en l'état, le Directeur de la publication
du site n'est pas responsable des propos tenus sur un forum.
Le lien de causalité est insuffisant ", affirme
Sébastien Canevet, Maître de conférence
en droit privé et internaute passionné.
Mais l'affaire qui, en France, a lancé le débat
sur la responsabilité juridique sur Internet met en scène
la société Altern. Cet hébergeur de pages
Web comptait parmi celles-ci des photos d'Estelle Halliday nues.
Cette dernière intente un procès pour atteinte
à son droit à l'image et à l'intimité
de sa vie privée et gagne. Altern, l'hébergeur
est condamné. " Personne n'a cherché à
savoir qui était l'auteur du site... Il ne devait pas
être solvable, s'insurge Sébastien Canevet. C'est
la politique du portefeuille ". Reste, suite à cette
affaire, un amendement à la loi sur l'audiovisuel (intégrée
à la loi sur la presse de 1881, Code pénal) a
été adopté. Il dispose : " pour que
la responsabilité des hébergeurs de site ne soit
pas engagée, ils doivent procéder aux diligences
appropriées, dès qu'ils sont saisis par des tiers
estimant que le contenu d'un site est illicite ou lui cause
un préjudice ". Sébastien Canevet commente
: " de peur de se voir condamné, l'hébergeur
n'hésitera pas à "tailler large" et
à supprimer systématiquement tout ce qui est un
peu douteux et risque de lui attirer des ennuis. A terme, s'en
sera finie de la liberté d'expression sur l'Internet
".
Protection
des données personnelles
Autre
enjeu juridique majeur de la législation s'appliquant à
Internet, la protection des données personnelles qui a déjà
fait couler beaucoup d'encre. La loi de 1978 relative à l'informatique,
aux fichiers et aux libertés l'a rendu obligatoire mais la
CNIL censée veiller au respect des dispositions de la dite
loi ne traite pas les contentieux...
Or, pour beaucoup d'internautes, la loi sur la sécurité
quotidienne (LSQ) d'octobre 2001 dont les décrets d'application
sont sortis fin juillet 2002 (1)
est une loi liberticide notamment en matière de vie privée.
Sébastien Canevet affirme qu'il s'agit d'un " flicage
généralisé des internautes qui, de fait, ne
vivent plus dans l'anonymat. Les policiers ou les commerçants
peuvent aujourd'hui aller voir où vous surfez. Malheureusement,
cette atteinte à la liberté d'opinion reste trop abstraite
pour les internautes qui ne se mobilisent pas assez sur ce sujet.
Et pourtant, imaginez que l'on vous oblige à vous déplacer
avec une balise GSM autour du cou... Sur Internet, c'est exactement
ce qui se passe ". La LSQ stipule, par exemple, que les fournisseurs
d'accès à Internet devront conserver leurs données
pendant un an. C'est, de plus, à eux de signaler quand les
données stockées semblent suspectes. Sur le plan européen,
la proposition de directive sur la protection des données
privées a été adoptée par le Parlement
européen en mai 2002. Celle-ci a fait l'objet de nombreux
amendements proposés par les conseils des ministres des 15.
" Par ailleurs, l'Union européenne, au nom de la lutte
contre le terrorisme a reçu une énorme pression des
Etats-Unis pour muscler les lois, affirme Martine Paulet, coordinatrice
de l'IRE (Internet Rights Europe). Or, la proposition de directive
indique clairement que les Etats membres peuvent à tout moment
intervenir pour restreindre la protection des données privées
". Et elle ajoute : " Ce type de loi restreint la liberté
de la société civile, pas des cybercriminels qui anticipent
et s'adaptent aux mesures prises ". A noter que grâce
à la cryptographie, rendue légale en France par une
loi de 1996, tout document peut être codé afin d'éviter
que toutes autres personnes que le destinataire en prennent connaissance.
L'utilisation de cette technique est indispensable lorsqu'il s'agit
d'assurer un minimum de confidentialité à un échange,
puisque les documents circulent "en clair" sur l'Internet.
Enfin, en matière de courrier électronique - considéré
comme une correspondance privée -, un salarié peut,
sur son lieu de travail, avoir recours aux mails pour des raisons
privées mais il doit le spécifier, ce qui permet en
cas de litige de couvrir l'employeur. Ce dernier, peut, par ailleurs,
surveiller les activités de son salarié notamment
en matière d'utilisation de l'Internet et de mail sachant
qu'une tolérance est de mise dans les entreprises dans ce
domaine. Attention, au civil, les mails s'ils ne sont pas récusés
par la partie adversaire sont considérés comme des
commencements de preuve par écrit.
Anne Dhoquois
Sites
- http://www.canevet.com/accueil/index.htm
Tout savoir sur Droit et Internet par Sébastien Canevet
: jurisprudence, législation, doctrine...
- http://www.iris.sgdg.org
Site de l'association "Imaginons un réseau Internet
solidaire"
- http://www.internet-juridique.net
Site dédié aux aspects juridiques des technologies
de l'information
- http://www.foruminternet.org
Site du Forum des droits sur Internet : espace d'information
et de débat sur le droit de l'Internet et des réseaux
1
- La LOPSI (loi d'orientation et de programmation pour la sécurité
intérieure) a été votée par le Sénat
le 31juillet dernier. Une annexe de la LOPSI prévoit
qu'un texte " permettant aux officiers de la police judiciaire
(OPJ) d'accéder directement à des fichiers informatiques
et télématiques et de saisir à distance
les renseignements qui paraîtraient nécessaires
" devra prochainement voir le jour.
Les
associations
Sébastien
Canevet a créé en juin 2002 la FIL, Fédération
Informatique et Liberté ; il est le président.
Celle-ci regroupe un certain nombre d'associations (RSF,
Act Up, etc.) dont l'objet est de défendre la vie
privée et la liberté d'expression. "
Les internautes commencent à s'organiser, explique
le président de la FIL. Du reste, nous nous constitueront
partie civile si besoin ".
L'IRE (Internet Rights Europe) est une autre association
oeuvrant dans le même champs d'action. Créée
en décembre 2001, cette toute nouvelle coalition
d'associations - qui va bientôt être structuré
en association de droit belge afin d'agir au plus près
de Bruxelles -, de mouvements sociaux et d'individus entend
défendre les droits humains, exercer un lobby auprès
des institutions européennes et faire un travail
de veille. Sa coordinatrice, Martine Paulet, observe :
" dans un contexte de mondialisation libérale,
les groupes d'intérêts commerciaux exercent
en matière d'Internet un fort lobby sur les autorités
judiciaires, les pouvoirs policiers et les gouvernements
nationaux. Au sein des pays de l'Union européenne,
c'est trop tard pour agir. Mais, dans les pays candidat
à intégrer l'UE, il n'existe pas encore
de réglementation... Ce potentiel nous permet d'espérer
que la législation suivra le bon chemin ".
Des associations internationales telles que l'ISOC (Internet
society) ont, par ailleurs, vu le jour. " On peut
les associer à des lobbys pratiquant une gouvernance
informelle ", explique Sébastien Canevet.
La
FIL : http://www.lafil.org
L'IRE : pas encore de site Internet. Voir les articles parus
sur http://www.mediasol.org.
Mail : mpaulet@ouvaton.org
ISOC (Chapitre français de l'Internet society)
: http://www.isoc.asso.fr
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